Magazine Avant-Goût - Les rayons de soleil de l'hiver

24 Avant-Goût Parqueuses d’huîtres à Arcachon, vers 1900. C’est sous Napoléon III que les premiers parcs ont vu le jour. quantité que plus tard ingurgitait la reine Marie-Antoinette. » Dans les Cahiers de la vie à Cancale (numéro 32, 2008) publiés par l’Association des amis des bisquines et du vieux Cancale, Bertrand Cadiou écrit : « Tout Cancalais sait que sa cité entre vraiment dans l’histoire en 1545, lorsque François Ier lui décerne le titre de ville pour "paiement des huîtres fournies à sa table". Il est dit que, par la suite, l’habitude de servir la cour dura jusqu’en 1789. » Cet appétit des têtes couronnées pour les huîtres est aussi stimulé par sa réputation aphrodisiaque colportée dès l’Antiquité grecque jusqu’à la table de Casanova et autres libertins. Mais l’huître fut aussi synonyme de funestes destins: elle fut fatale pour François Vatel, le célèbre cuisinier de Louis XIV qui se suicida au château de Chantilly parce que la marée était en retard. SOUS NAPOLÉON III, NAISSANCE DE L’OSTRÉICULTURE Cet engouement jamais démenti au cours des siècles pour l’huître plate épuisa la ressource.En 1759,Louis XV imposa la restriction du « colportage et de la vente » pendant une période allant du 1er avril au 31 octobre, raconte Patrick Cadour, « à la fois pour des raisons sanitaires (les huîtres sont plus vulnérables à la saison chaude) et pour limiter leur consommation au moment de la reproduction ».En dépit de ces mesures,les bancs de mollusques pillés n’arrivaient plus à se reconstituer quand au XIXe siècle, l’empereur Napoléon III chargea Victor Coste,naturaliste, et Ferdinand de Bon, chef de service de la Marine, de transformer l’activité de cueillette des huîtres en véritable ostréiculture avec la création de parcs à Arcachon puis dans la baie de Saint-Brieuc. • HUÎTRES ET VINS, DES DESTINS LIÉS Il n’y a pas de hasard si le vin et les huîtres ont une histoire commune, comme on aime le répéter dans la famille Lamaison, ostréiculteurs depuis quatre générations à Ronceles-Bains en Charente-Maritime où ils bichonnent leurs Marennes Oléron, seule huître française à bénéficier d’une indication géographique protégée (IGP). « Tout rapproche le monde de l’ostréiculture et celui du travail de la vigne, c’est aussi la même foi qui réunit ces hommes passionnés par leur terroir et leur histoire. Tout naturellement, en tant que passionnés de Bacchus, il était clair pour nous que cette huître d’exception devait être façonnée, affinée et dégustée comme les plus beaux Grands Crus que nous chérissons tant en France. » Au-delà de ce credo, il est un autre constat incontournable : l’huître et la vigne nous font remonter à la nuit des temps de l’humanité. Nourriture sauvage d’abord, le mollusque bivalve et la liane porteuse de raisins ont été domptés au fil des siècles par l’homme, son sens de l’observation, sa main, sa mémoire, bref tout ce qui constitue une culture, un savoirfaire, sachant que c’est toujours la nature qui a le dernier mot quand le phylloxera décime le vignoble français à la fin du XIXe siècle et que la maladie frappe les huîtres à maintes reprises. Mais toujours le vigneron et l’ostréiculteur se relèvent, pugnaces, inventifs. • DOSSIER SPÉCIAL ©Neurdein/Roger-Viollet 24 Avant-Goût

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